Au moment d’aller au lit le soir, ou durant la nuit, votre enfant se plaint de douleurs aux jambes. Il est fort probable que cela s’explique par le diagnostic de “douleurs de croissance”.

En effet, ces douleurs ne tiennent pas du mythe ou de l’imagination de l’enfant. Elles sont bien connues de la médecine pédiatrique. Les douleurs de croissances surviennent généralement entre les âges de trois à cinq ans puis de neuf à quinze ans, avec une prévalence qui varie de 3 à 37% des enfants et touche davantage les garçons. On note souvent un lien génétique avec les parents qui auraient souffert de cette affection dans leur enfance.

 

Signes et symptômes

Après une journée particulièrement mouvementée durant laquelle l’enfant aura couru, sauté et bougé sans arrêt, il est possible que le surmenage physique se traduise par la douleur en fin de journée ou durant la nuit.

Les douleurs sont la plupart du temps ressenties dans les deux jambes et, même si elles peuvent se déplacer d’un endroit à un autre, elles sont facilement identifiées par l’enfant :

  • les mollets (généralement le site le plus fréquent)
  • l’arrière des genoux
  • les cuisses
  • les tibias (le bas de la jambe)

Elles peuvent survenir de manière récurrente ou épisodique et leur durée peut être de plusieurs mois. Pour ce qui est de l’intensité de la douleur, elle peut varier de légère à modérée et parfois sévère. Après un épisode nocturne de douleurs dans les jambes, l’enfant retrouve généralement sa forme physique normale. Lorsque les parents ou le médecin examinent l’enfant, il n’y a pas de signe d’enflure dans les régions douloureuses.

Puisque l’intensité de la douleur est variable et intermittente, il est possible que certains enfants soient peu perturbés alors que d’autres n’arrivent pas à gérer la douleur et nécessitent l’intervention des parents.

 

Les causes physiologiques

Les causes exactes des douleurs de croissance ne sont pas à ce jour bien définies par la médecine pédiatrique. Dans la majorité des cas, les douleurs de croissance ne sont pas un problème médical et ne nécessitent pas d’examen clinique particulier sauf dans le cas de signes et de symptômes pouvant mener à d’autres possibilités de diagnostiques*.

Cependant, dans la littérature scientifique, nous retrouvons des explications basées sur la compréhension de l’anatomie et de la physiologie de la croissance de l’enfant afin de définir le mécanisme des douleurs de croissance.

La croissance de la taille de l’enfant entre l’âge de trois à cinq ans, et chez les jeunes de huit à douze ans, est particulièrement importante au niveau des membres inférieurs. La longueur de l’os de la cuisse (le fémur) et celui de la jambe (le tibia) peuvent grandir considérablement en quelques semaines ou mois. Conséquemment, les muscles des jambes vont subir une tension d’étirement afin de pouvoir s’adapter à l’allongement rapide de ces os.

En s’attardant avec précision sur l’anatomie musculo-squelettique, des spécialistes ont élaboré l’hypothèse de “causes mécaniques” pouvant expliquer la dynamique structurelle des douleurs de croissance. Les muscles dans les jambes (et le reste du corps) sont attachés sur les os à des endroits très précis par les tendons et les fascias. Ces structures d’insertion ont la particularité d’être à la fois souples et pourtant en partie inextensibles. Durant les différentes périodes de poussée de croissance, les régions où l’enfant ressent les douleurs sont précisément reliées à ces structures d’attaches. Une poussée de croissance occasionne un allongement significatif des os ce qui entraîne un étirement intense en continu et inhabituel des muscles des jambes. Les structures d’attache des muscles subissent alors une tension d’importance ce qui explique la douleur locale ressentie par l’enfant dans les régions affectées de ces jambes.

En conclusion, la cause principale des douleurs de croissance serait donc reliée au manque de souplesse musculaire et non pas à des douleurs situées dans les os. Les douleurs de croissance sont davantage reliées à l’étirement des muscles qui occasionne de la douleur aux structures d’attache de ceux-ci dans les jambes.

Le lien avec la probabilité des douleurs de croissance qui surviennent à la suite de journées où l’activité physique de l’enfant est intense, va dans le sens logique de l’explication physiologique et anatomique du manque de souplesse musculaire.

 

Traitement et prévention

L’intensité des douleurs de croissance est très variable d’un enfant à l’autre, certains seront peu incommodés alors que d’autres auront besoin d’intervention pour diminuer la douleur. Il est important de prendre le temps d’écouter l’enfant et d’être attentif à ses symptômes. Afin de soulager la douleur, il est recommandé de masser la région affectée et d’appliquer de la chaleur. En cas de douleur intense, il est possible de donner un analgésique mineur (acétaminophène ou ibuprofène). Les douleurs de croissance peuvent être intermittentes durant plusieurs jours ou semaines. Il est important de considérer que la surconsommation de médication peut entraîner chez l’enfant des conditions cliniques néfastes.

Dans le but de prévenir les douleurs de croissance, la médecine pédiatrique recommande :

  • d’enseigner à l’enfant des exercices d’étirement à pratiquer avant d’aller au lit.
  • d’enseigner à l’enfant de prendre l’habitude de s’étirer avant et après la pratique d’activités physiques.
  • de consulter un thérapeute de la santé tel un ostéopathe ou un physiothérapeute spécialisé en pédiatrie.

 

L’ostéopathie et les douleurs de croissance

L’ostéopathie est une approche thérapeutique globale du corps. Les tests d’évaluation et les techniques utilisées visent à identifier et traiter les causes des douleurs et déséquilibres de manières à ce que les symptômes se normalisent. Dans l’approche du traitement des douleurs de croissance, l’ostéopathe spécialisé en pédiatrie maîtrise particulièrement la connaissance des processus de développement du système musculo-squelettique de l’enfant afin d’identifier et de traiter avec précision et efficacité les structures affectées par les transformations liées à la croissance. La spécificité de l’ostéopathie est également de traiter l’ensemble des régions du corps de l’enfant qui subissent des transformations importantes tout au long de la période de croissance.

Lors de la première rencontre avec mon jeune patient dont les parents me consultent pour des douleurs de croissance, je profite de l’occasion pour faire une évaluation globale de l’ensemble du squelette, de la musculature et de la symétrie globale de la posture de l’enfant. Entre le début de la marche et l’âge de sept à neuf ans, les membres inférieurs vont subir des adaptations très importantes qui vont influencer la symétrie du bassin, de la colonne vertébrale et l’ensemble du reste du corps en formation.

La médecine pédiatrique documente avec spécificité les déformations et malformations des membres inférieurs liées au processus de croissance (genu varum/valgum, endogyrisme/exogyrisme, pieds plats/creux, équin du pied, etc). Le travail de prévention que je préconise dans ma pratique clinique est justement d’identifier le plus tôt possible une anomalie ou asymétrie structurelle de croissance afin de réduire ses impacts nuisibles dans le développement de l’harmonie du corps du jeune enfant en devenir d’un adulte. J’enseigne également à l’enfant des exercices faciles à faire afin de l’impliquer dans l’amélioration de sa santé, d’optimiser mon traitement et de réduire le nombre de visites à ma clinique.

 

* Il est recommandé de consulter un médecin dans le cas où :

  • les douleurs ressenties durant la nuit persistent durant la journée.
  • lorsque l’enfant ne peut continuer à faire ses activités au quotidien.
  • lorsque son état général s’est détérioré et qu’il a de la fièvre.
  • si une partie de ses jambes est enflée, rouge et occasionne de la douleur au toucher.
  • lorsque l’enfant boîte et ne peut tenir debout sur sa jambe.
  • lorsque des boutons apparaîssent sur son corps accompagnés de douleurs.

 

Références

Turgeon J., Dictionnaire thérapeutique pédiatrique Weber, 2e édition, Gaëtan Morin, 2017

Beers MH.,Manuel Merck de diagnostic thérapeutique, 4e édition française, Merck Research Laboratories, 2006

Vekemans G., L’ABC de la santé des enfants, Les éditions La Presse, 2013

Scherl SA., Common lower extremity problems in children, Pediatr Rev 2004 ; 25:52-62

Sullivan JA., Pediatric flatfoot : Evaluation and management, J Am Acad Orthop Surg, 1999 ; 7:44-53

Sergueef N., Ostéopathie Pédiatrique, Elsevier Masson SAS, 2007