« Encore trop de bébés à la tête plate » selon l’article sur le sujet de la plagiocéphalie paru à l’automne 2017 dans le journal La Presse. Les récentes études sur cette condition clinique du nourrisson sont unanimes, pour éviter le port du casque (orthèse crânienne) le dépistage de la plagiocéphalie doit se faire très tôt. Les professionnels de la santé au Québec interrogés dans l’article sont également unanimes à propos du syndrome de la tête plate « il n’y a pas assez de prévention, les parents sont peu informés sur la plagiocéphalie et le torticolis qui est souvent associé ».Les parents devraient être renseignés sur ce sujet lors des cours prénataux et à la sortie de l’hôpital à la naissance afin d’éviter l’instalation du problème.
À la naissance et durant les premières semaines de vie, le nouveau-né passe plus de 16 heures par jour à dormir. Le crâne du nourrisson durant cette période est particulièrement malléable. L’aplatissement est causé par les périodes prolongées de sommeil sur le dos et en position assise durant lesquelles la tête du bébé est en rotation d’un seul coté. Cette position unilatérale de la tête est souvent en lien avec un torticolis de naissance faisant en sorte que l’enfant ne peut placer ou garder sa tête des deux côtés et cela même avec l’intervention des parents.
Définitions de la plagiocéphalie
On utilise plus couramment le terme « tête plate » pour définir la plagiocéphalie positionnelle du nourrisson.
La plagiochéphalie est définie par les asymétries du crâne suivante (selon différents degrés de sévérité) ; une moitié de la tête arrière est plus plate avec le front et l’oreille plus avancé du même coté. Le front du côté opposé à celui qui est bombé semble plus plat et l’œil de ce côté est plus petit que l’autre. Globalement la tête ressemble à une forme de parallélogramme lorsqu’on l’observe par le dessus.
Une autre forme d’aplatissement du crâne est la brachycéphalie positionnelle. Elle est définie par un plat au centre en arrière de la tête qui occasionne une compensation en élargissement du visage. L’absence de rondeur de l’arrière de la tête dans certains cas donne en vue de profil une élévation du crâne en forme de pointe.
Dans la pratique clinique, la malformation ou l’aplatissement du crâne du nouveau-né est remarqué par les parents ou diagnostiqué par les médecins, ou autres intervenants en périnatalité autour de l’âge de 2 à 4 mois. Selon l’article du journal La Presse « la grande majorité des parents remarquent que c’est entre l’âge de 4 à 8 semaines qu’ils se sont aperçus que la tête de leur bébé s’était aplatie… Il y a une prévention à faire justement pour empêcher cela ».
Les causes de la plagiocéphalie et de la brachycéphalie
Les causes de l’applatissement du crâne du nouveau-né sont en lien avec plusieurs circonstances qui sont reliées entre elles, et qui peuvent survenir avant, pendant et après la naissance. La position du corps de l’enfant et celle de sa tête dans l’utérus lors des dernières semaines de la grossesse peut déjà causer un aplatissement ou une déformation du volume global du crâne du bébé. Un torticolis de naissance, qui limite la rotation de la tête du nouveau-né peut contribuer à un aplatissement d’un seul côté et occasionner la formation de la plagiocéphalie. Cependant, le facteur le plus souvent relié à la formation de la plagiocéphalie et la brachycéphalie ou le plus aggravant est relié à la position de sommeil du nouveau-né.
La plupart des recherches cliniques établissent un lien entre l’augmentation importante de cas de tête plate au cours des 20 dernières années et la campagne «Dodo sur le dos» de la Société Américaine de Pédiatrie (1992). Les recommandations de cette campagne sont de faire dormir le nouveau-né sur le dos afin de réduire les risques de décès causés par la mort subite du nourrisson (MSN). Les récentes données cliniques évaluent entre 13 % à 40 % le nombre de nourrissons âgés de moins d’un an qui peuvent être diagnostiqués de plagiocéphalie ou de brachycéphalie, selon un classement de degré de sévérité de légère, modérée à sévère, en lien avec les recommandations de sommeil sur le dos.
La prévention
Contrairement à la croyance médicale antérieure et la banalisation de la tête plate sur le fait que celle-ci va se corriger d’elle même avec le temps, les récentes études démontrent que la prévention dès la naissance est primordiale afin d’éviter l’aplatissement du crâne du nouveau-né et l’aggravation. Les recommandations des experts sont :
- Dès le moment ou le cordon ombilical est tombé il est important de mettre le bébé sur le ventre le plus souvent possible durant les périodes d’éveil sous la supervision du parent. Au début le nourrisson n’apprécie pas la position, cependant quelques minutes (1 à 2 minutes avant l’âge de 1 mois et 3 à 5 minutes à l’âge de 2 à 3 mois) sur le ventre plusieurs fois par jour rendra l’exercice de développer les muscles du cou plus tolérable et agréable.
- Varier les positions de bébé régulièrement. Dans le lit pour le sommeil et dans la poussette alterner la position de bébé afin de stimuler la rotation de la tête des 2 côtés. Éviter de laisser l’enfant trop longtemps assis dans les sièges (transat et coquille) en périodes d’éveil en privilégiant le porte bébé pour les 2 premiers mois de vie.
- Durant les périodes d’éveil sur le dos sous la supervision du parent placer le bébé entre des petits rouleaux afin qu’il soit légèrement sur le côté à 45 degrés (en alternant les côtés) ou utiliser un coussin ergonomique sous la tête afin d’éviter que celle-ci repose sur une surface dure.
Traitement de la plagiocéphalie et de la brachycéphalie
La nature des traitements pour corriger les malformations du crâne du bébé a évolué au cours de la dernière décennie. De l’absence de traitement ou d’intervention, elle a évolué vers des approches telles que la physiothérapie, le port d’orthèse crânienne (casque), les conseils de positionnement et l’ostéopathie.
Cependant même si l’importance d’initier le traitement le plus tôt possible a été établie, on observe que les parents et les médecins retardent les interventions en espérant que les asymétries vont se corriger d’elles mêmes, à mesure que le bébé grandit. Le remodelage progressif de la tête, dans plusieurs des cas, ne se produit pas et un délai de prise en charge peut augmenter la sévérité de l’aplatissement de la tête et augmenter la durée du port du casque lorsque celui-ci devient inévitable.
Le casque est moulée sur mesure pour la tête de chaque nourrisson afin de corriger globalement sa forme. Selon l’âge de l’enfant et le degré de sévérité de l’aplatissement du crâne le casque peut être porté pendant 3 à 5 mois durant 23 heures par jour ou moins selon le cas à la fin du traitement.
La plagiocéphalie, la brachycéphalie et l’ostéopathie
Le traitement en ostéopathie de la plagiocéphalie et la brachycéphalie, associé aux conseils de positionnement offre une approche qui peut contribuer à corriger les malformations du crâne et éviter le port du casque en tenant compte de l’âge de l’enfant et la sévérité de l’aplatissement de la tête. Les sutures du crâne ne sont pas encore « soudées » avant la fermeture de la fontanelle (à l’âge d’environ 12 mois) et en ce sens l’ostéopathe s’applique précisément à les rendre plus mobiles, afin de permettre une correction du volume global de la tête du bébé durant les périodes de positionnement.
Également, le travail de l’ostéopathe consiste à identifier les structures musculaires et ligamentaires qui présentent des tensions causé par le torticolis de naissance lié à la plagiocéphalie. À l’aide de manipulations précises et sans utilisation de force ou de tension significative, l’ostéopathe restaure la forme et la mobilité de ces structures. Des exercices de physiothérapie doivent être enseignés aux parents afin de contribuer à éliminer graduellement le torticolis de naissance.
Pour augmenter le potentiel de correction de la malformation du crâne et diminuer le nombre de scéances de traitement en ostéopathie, ma longue expérience comme ostéopathe spécialisée en pédiatrie et également en asymétries crâniennes, m’a amené à constater que l’implication des parents est primordiale. Je rappelle souvent aux parents que chacune des positions dans lesquelles l’enfant est placé durant le sommeil et l’éveil, comptent dans notre travail contre l’aplatissement et sont en faveur de la correction rapide du crâne.
J’utilise des recommandations de positionnement du bébé avec des indications précises et faciles à faire dans le quotidien à la maison et en tout temps. Pour certaines malformations j’enseigne aux parents des techniques de « modelage » du crâne du bébé, celle-ci faites quotidiennement contribuent à améliorer l’aspect global du crâne, elles s’apparentent au principe de modelage du casque.
Le nombre de séances de traitement en ostéopathie varie selon l’âge du bébé et la sévérité des asymétries. Dans la pratique clinique ostéopathique, on observe qu’il nécessite entre 2 à 3 traitements pour une plagiocéphalie ou une brachycéphalie légère à modérée et entre 4 à 5 traitements pour les cas plus sévères, en tenant compte bien entendu de l’ensemble des facteurs de la condition globale du bébé.
Références
Turgeon J., Dictionnaire thérapeutique pédriatrique Weber, 2e édition, Gaëtan Morin Éditeur, 2017
Beers, M.H., Le Manuel Merck, traduction en français de la 18e édition, Merck Research Laboratories, 2006
Vekemans, G., L’ABC de la santé des enfants, Les Éditions La Presse, 2013
Mieux vivre avec notre enfant de la grossesse à deux ans, INSPQ, 2017